Quelle est la place de l’hospitalité dans votre entreprise?

Michael Böhler: Hospitalité et personnel satisfait vont de pair. Nous proposons des conditions de travail modernes afin d’obtenir le degré de satisfaction le plus élevé possible.

Quel est l’avantage de la numérisation à la réception?

Les moyens technologiques permettent à nos employés de reconnaître plus facilement nos clients. Grâce à ces outils, nous savons si un client est déjà venu et quels souhaits sont enregistrés sous son nom. Dans une ville comme Zurich, le flux de clientèle est important. De nombreuses personnes ne restent qu’une seule nuit chez nous. Ce n’est pas comparable avec un hôtel de vacances qui accueille les mêmes clients pendant une semaine ou plus. La reconnaissance électronique des clients nous permet d’offrir un service plus personnel.

Dans quelles zones de l’hôtel la numérisation est-elle particulièrement importante?

Chez nous, la numérisation est une obsession! Je plaisante, bien sûr. En fait, nous nous sommes penchés sur les interactions entre le personnel et les clients. Ensuite, nous nous sommes demandés comment nous pouvions simplifier les processus. Plus le personnel est déchargé, plus il a de temps à accorder aux clients. Nous avons numérisé l’accueil au mois de mai 2019. La réception classique a été remplacée par un hall ouvert avec un bar à café et de nombreux sièges. Nos clients peuvent s’enregistrer sur leur téléphone portable ou leur ordinateur avant leur arrivée. Ils reçoivent ainsi leur clé directement et sans formalité une fois sur place.

Quand on évoque l’hospitalité, la première chose qui vient à l’esprit, c’est le contact entre le client et le personnel. Or, vous n’avez plus de réception. N’est-ce pas contradictoire?

En fait, nous avons toujours une réception, mais le concept est différent. C’est une «réception mobile». Certains pensent à tort que l’absence de réception traditionnelle signifie que tout est entièrement numérisé et robotisé. Ce n’est évidemment pas le cas. La technologie nous permet de simplifier les processus et les procédures administratives. Nous pouvons ainsi accorder plus de temps à nos clients et privilégier le contact individuel. De plus, nous n’avons jamais eu l’intention de supprimer des emplois. Suite à un remaniement organisationnel efficace, nous avons fait passer le taux d’occupation de 65% à 85%, et nous le gérons avec les mêmes ressources.

Comment la clientèle a t-elle accueilli ce nouveau concept?

Très bien! Les clients ont parfois fait un long voyage. Lorsqu'ils arrivent, ils peuvent s’asseoir un moment dans le hall et prendre un café en toute tranquillité. Le personnel n’attend plus derrière un comptoir de réception. Il va vers le client de manière proactive pour lui donner des informations et répondre à ses questions. Nos collaborateurs ont toujours leur tablette sur eux. C’est le client qui indique au personnel où il souhaite discuter: autour d’un café, au bar ou même dans la chambre. La technologie permet une plus grande flexibilité.

Il y a aussi des clients qui n’ont aucune affinité avec la technologie. Comment font-ils?

Aucun problème! Bien que nous soyons un hôtel numérisé, la technologie n’est qu’un outil. La numérisation ne doit pas être omniprésente et déstabiliser le client. Nous proposons un choix entre numérique et analogique. Le client peut se servir ou se faire servir. Il a également la possibilité de s’enregistrer auprès de nos employés sur place, comme il l’a toujours fait. Mais là encore, grâce à la technologie, tout va plus vite: la tablette permet de scanner rapidement la carte d’identité et la carte de crédit, et le client n’a plus besoin de remplir un formulaire.

Comment la technologie améliore t-elle l’interaction entre le personnel et les clients?

La discussion avec le client n’est plus une suite de questions tirées d’une liste, mais un entretien-conseil. Il est plus agréable d’avoir un entretien autour de recommandations. Grâce à la suppression de certaines tâches administratives, les formulaires d’inscription ont disparu. Après avoir accueilli le client, nous lui indiquons les événements du moment comme le marathon de Zurich, le Sechseläuten, etc. Les employés ont créé de leur propre initiative une carte destinée aux clients. Ils l’utilisent pour présenter leurs préférences et recommandations. Grâce à la numérisation, nos employés ont maintenant le temps de créer des offres individuelles en y mettant leur touche personnelle.

Avez-vous remarqué un changement au niveau de la satisfaction des clients?

Avant, les évaluations étaient majoritairement dans la moyenne supérieure. Sur les dix points possibles, les clients donnaient entre huit et dix pour leur séjour, ou sept s’ils n’étaient pas entièrement satisfaits. Aujourd’hui, les notes se situent entre neuf et dix, ou alors à l’inverse, entre quatre et cinq lorsque les clients rejettent le nouveau concept. Cela nous montre clairement que nous sommes bien positionnés. Même le meilleur hôtelier ne peut pas satisfaire entièrement tous les clients. Mais nous offrons le service à la clientèle qui nous correspond le mieux.

Comment traitez-vous les réclamations?

Nos collaborateurs disposent d’une grande marge de manœuvre pour résoudre les problèmes. Leur priorité est de réagir aux réclamations. Un outil de traitement des réclamations analyse tous les avis reçus. De cette manière, nous évitons de donner trop de poids aux commentaires individuels. Ce sont surtout les tendances qui sont significatives pour l’évaluation des réclamations.

Selon une étude de l’Université de Berne, les établissements les plus conviviaux sont le plus souvent les petits hôtels ruraux qui accueillent des vacanciers suisses. L’hôtel Opera est un grand établissement urbain qui s’adresse à un public international et une clientèle d’affaires. Quels sont les enjeux dans votre cas?

L’hôtellerie de villégiature a plus de temps pour corriger les erreurs. La clientèle passe moins de temps chez nous. C’est pourquoi nous devons être irréprochables, de l’arrivée au départ du client. Les clients d’un hôtel de vacances recherchent le contact avec le personnel. Ce n’est pas forcément le cas chez nous. Certaines personnes veulent simplement être rapidement dans leur chambre et ne souhaitent rien de plus. Nous filtrons les clients qui sont ici pour trois ou quatre jours. Nous leur montrons par le biais de nos prestations que nous sommes heureux de les accueillir. Ici, le contact est important, en particulier avec nos clients réguliers.

L’hôtel Opera comprend également le restaurant Opera. La gastronomie est-elle aussi numérisée?

Nous présentons la carte des vins sur une tablette. Les clients aiment généralement avoir plus d’informations de base sur le vin, mais aussi sur le producteur. En outre, notre équipe prend les commandes sur tablette.

Est-il possible que cela limite le contact avec le client?

Pas du tout! Le personnel dûment formé prend la commande avec une tablette comme avec un bloc-notes. Cela ne fait aucune différence pour le client. En revanche, cela augmente l’efficacité. Et c’est un aspect très apprécié par nos clients. Nous avons remarqué que les clients qui dînaient au restaurant avant de se rendre à l’opéra craignaient souvent de manquer le début de la représentation. Nous avons donc lancé une nouvelle offre, la Garantie Opéra. Le repas est servi en l’espace d’une heure, et l’addition est sur la table une demi-heure avant le début de la représentation. Faute de quoi, nous offrons le repas! Depuis que nous avons lancé cette formule, les clients sont plus détendus et l’ambiance est plus conviviale.

Qu’aimeriez-vous dire à vos collègues de la branche au sujet de la numérisation?

Je pense que la branche doit s’ouvrir et être plus entreprenante en matière de numérisation. Les nouveaux outils sont souvent moins chers qu’on ne le pense. Aujourd’hui, une entreprise n’est plus liée sur dix ans à un système coûteux ou jusqu’à ce qu’il soit amorti. Les solutions en nuage (cloud) sont plus efficaces. Elles peuvent être testées et résiliées rapidement au besoin. Je conseille aux hôteliers de se renseigner et de tester les nouvelles technologies. La numérisation peut en effet créer une importante valeur ajoutée.

L’hôtel Opera est situé dans le quartier zurichois de Seefeld qui longe le lac. L’entreprise effectue sa transition numérique depuis 2016, se démarquant ainsi de la concurrence. Grâce au concept «The Lobby», la clientèle est nationale et internationale. L’hôtel quatre étoiles propose 58 chambres pour la clientèle de loisirs et d’affaires. Michael Böhler dirige l’entreprise depuis mars 2017. Son équipe de 66 collaboratrices et collaborateurs veille au bien-être de la clientèle.